Le quiet firing désigne une pratique insidieuse qui peut profondément affecter le climat de travail et le bien-être des employés. Cet article explore ce phénomène, ses impacts, et les mesures à adopter pour le prévenir ou y faire face de manière constructive.
Quiet firing : définition
Le "quiet firing" (ou licenciement silencieux) désigne une pratique de gestion où une entreprise ou un manager pousse, de manière indirecte et souvent subtile, un employé à quitter son poste sans procéder à un licenciement formel. Plutôt que de communiquer ouvertement sur des attentes ou des problèmes de performance, l'organisation peut mettre en place des actions qui rendent le travail de l'employé difficile, frustrant ou insoutenable. Ces pratiques peuvent inclure un manque de reconnaissance, l'absence de perspectives d'évolution, une surcharge de travail, ou encore l'exclusion des prises de décision importantes.
L'objectif implicite du quiet firing est souvent d'inciter l'employé à démissionner par lui-même, évitant ainsi à l'employeur de gérer un licenciement formel ou de verser des indemnités. Toutefois, cette approche peut nuire à la culture d'entreprise, à la motivation des équipes, et exposer l'organisation à des risques juridiques et réputationnels.
Quelques exemples de manifestations du quiet firing
- Réduction des responsabilités ou tâches sans explication
- Absence de feedback constructif ou de communication régulière
- Refus systématique de promotions ou de formations
- Isolement de l'employé dans les processus de travail ou les interactions sociales
- Attribution de tâches monotones ou en-deçà des compétences de l'employé
Pourquoi le quiet firing est problématique ?
Cette méthode évite de traiter les problématiques de manière directe et respectueuse, ce qui est contraire aux principes d’une gestion saine. Le quiet firing pose problème à plusieurs niveaux, car il repose sur une gestion passive-agressive plutôt que sur une communication ouverte et respectueuse. Cela crée des tensions qui affectent tant l’employé ciblé que l’ensemble de l’équipe. Voici les principaux impacts négatifs :
L’absence de transparence ou de soutien peut générer une forte démotivation, de l’anxiété, ou même un épuisement professionnel. L'employé peut ressentir un sentiment d'injustice et de frustration, affectant sa performance et sa confiance en soi.
Le reste de l’équipe peut observer ces pratiques et les interpréter comme un manque de respect ou de valorisation des collaborateurs, ce qui nuit à la culture d’entreprise.
Un employé marginalisé ou démotivé sera moins investi dans ses tâches, ce qui peut affecter les résultats de l'équipe.
Comment identifier le quiet firing en entreprise ?
- Réduction des responsabilités : si un employé voit ses missions importantes ou stimulantes transférées à d'autres sans explication, cela peut être un signe que l'employeur cherche à minimiser son rôle.
- Manque de reconnaissance : l'absence persistante de feedback positif ou d'évaluations constructives, malgré des efforts ou des résultats, peut refléter une volonté de démotiver l'employé.
- Blocage des opportunités : si l'employé est systématiquement exclu des promotions, formations, ou projets d'évolution, cela peut signaler un désintérêt pour sa progression au sein de l'entreprise.
- Isolement : être tenu à l'écart des réunions, des décisions importantes, ou des interactions sociales de l'équipe peut conduire l'employé à se sentir marginalisé.
- Conditions de travail dégradées : une surcharge de travail injustifiée, des horaires inflexibles, ou l’absence de ressources nécessaires pour accomplir les missions peuvent créer un environnement insoutenable.
- Manque de communication : une absence prolongée de dialogue entre le manager et l'employé peut indiquer un désengagement volontaire de la part de l’encadrement.
Comment réagir en tant qu’employeur face à des pratiques de quiet firing ?
En tant qu’employeur ou responsable RH, il est essentiel d’identifier et de traiter rapidement les situations de quiet firing, car elles impactent non seulement l’employé ciblé mais aussi la culture et les performances de l’entreprise. Voici les étapes clés à suivre :
1. Reconnaître le problème
Il faut d’abord reconnaître que des pratiques de quiet firing peuvent exister dans l’entreprise, même involontairement. Ces comportements sont souvent liés à un manque de formation managériale ou à des conflits non résolus. Soyez attentif aux signaux tels que :
- Des plaintes récurrentes d’employés sur un manager ou un service
- Des indicateurs de climat social / RH inquiétants (turnover élevé, absentéisme accru, baisse d’engagement)
- Des comportements ou décisions managériales qui marginalisent un collaborateur
Exemple : Si un employé exprime son malaise dans une enquête de satisfaction ou lors d'un entretien avec les RH, prenez cette alerte au sérieux.
2. Instaurer un dialogue transparent
Dès qu’un cas de quiet firing est suspecté, organisez une discussion ouverte avec l’employé concerné. Le but est de comprendre son ressenti, ses difficultés et de rétablir une communication constructive. Parallèlement, rencontrez également le manager pour obtenir une vision complète de la situation.
- Avec l’employé : posez des questions ouvertes et assurez-vous qu’il se sente écouté, par exemple : "Quels aspects de votre rôle vous semblent problématiques aujourd’hui ?"
- Avec le manager : analysez les causes des comportements observés, qu’il s’agisse de tensions relationnelles, d’un manque de formation ou d’une incompréhension des attentes.
3. Mettre en place un plan d’action correctif
Une fois les causes identifiées, prenez des mesures concrètes pour résoudre la situation. Ces actions doivent viser à rétablir la confiance et à garantir des pratiques managériales équitables.
Formez les managers, proposez des formations sur la communication, le feedback constructif et la gestion des conflits. Cela les aide à éviter les comportements qui pourraient être perçus comme du quiet firing.
Clarifier les attentes et assurez-vous que l’employé connaît ses objectifs, ses responsabilités et les opportunités d’évolution.
Redéfinissez les rôles si nécessaire. Si l’employé estime que ses compétences sont sous-utilisées, explorez des ajustements de poste ou des projets alignés avec ses attentes.
Vous souhaitez améliorer votre système de feedback interne ? Ces outils gratuits peuvent vous aider.
4. Renforcer la culture d’entreprise
Privilégiez une culture d’entreprise qui encourage la transparence et la reconnaissance. Les employés doivent sentir qu’ils peuvent exprimer leurs préoccupations sans crainte de représailles.
- Créer des canaux de feedback réguliers : enquêtes de satisfaction, entretiens individuels avec les RH, ou boîtes à suggestions anonymes.
- Valoriser les réussites : mettre en avant les contributions des employés de manière systématique, évitant ainsi toute perception d’exclusion.
5. Surveiller les effets et ajuster les pratiques
Une fois les actions mises en place, suivez l’évolution de la situation pour vous assurer que les changements produisent l’effet escompté. Si les problèmes persistent, envisagez des mesures plus drastiques, comme des sanctions disciplinaires envers les managers fautifs ou des réorganisations internes.
Concrètement : Si un manager persiste dans des pratiques inappropriées malgré les formations et retours, il peut être nécessaire de reconsidérer son aptitude à occuper ce rôle.
Comment mettre en place une approche préventive pour éviter l’apparition du quiet firing ?
La prévention du quiet firing repose sur une stratégie proactive qui favorise une culture managériale saine et transparente. Cela commence par la formation des managers, qui doivent être équipés pour gérer efficacement les conflits, offrir des retours constructifs, et maintenir un dialogue ouvert avec leurs équipes. Ces formations devraient inclure des modules sur la gestion des émotions, le développement d'une communication bienveillante et la reconnaissance des signes de désengagement ou de mal-être chez les collaborateurs. Il est également essentiel de clarifier les attentes en matière de pratiques managériales par des politiques internes précises, qui valorisent le respect, l’équité et l’inclusion.
Par ailleurs, les employeurs peuvent mettre en place des mécanismes permettant aux employés d'exprimer leurs préoccupations en toute sécurité. La création de canaux de remontée d'informations anonymes, comme des boîtes à suggestions numériques ou des enquêtes de satisfaction régulières, peut aider à détecter les tensions en amont. De plus, un système de suivi des promotions, formations, et réévaluations de poste doit être instauré pour garantir que chaque collaborateur bénéficie d’opportunités d’évolution équitables. En instaurant ces pratiques préventives, l’entreprise montre son engagement envers le bien-être de ses employés, réduisant ainsi les risques de comportements de quiet firing.
Quiet firing : quels sont les risques pour l’employeur ?
En France, bien que le terme "quiet firing" ne soit pas explicitement mentionné dans la législation, les pratiques qui consistent à pousser un salarié à la démission par des moyens détournés peuvent être assimilées à du harcèlement moral. Le Code du travail stipule que "aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel".
Les employeurs qui recourent à de telles pratiques s'exposent à plusieurs risques :
- Sanctions pénales : le harcèlement moral est un délit passible d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 15 000 euros
- Sanctions civiles : le salarié victime peut saisir le conseil de prud'hommes pour obtenir des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi
- Atteinte à la réputation : de telles pratiques peuvent ternir l'image de l'entreprise, affectant sa marque employeur et sa capacité à attirer de nouveaux talents
Il est donc essentiel pour les employeurs de veiller à des pratiques managériales transparentes et respectueuses des droits des salariés, afin d'éviter ces risques juridiques et réputationnels. La nomination d’un référent harcèlement est également bienvenue pour prévenir ces pratiques.
Liens utiles :
- Les articles liés au harcèlement moral dans le Code du Travail
- La fiche pratique du Service Public au sujet du harcèlement moral en entreprise
Recommandations pour les salariés victimes de quiet firing
Pour un salarié confronté à une situation de quiet firing, la première étape est de prendre conscience des pratiques subies. Il peut être utile de tenir un journal détaillant les comportements ou décisions qui semblent le marginaliser, comme des responsabilités réduites ou des exclusions des réunions. Ce document factuel peut servir de base pour initier un dialogue constructif avec son manager ou les ressources humaines. Une fois ces observations consignées, il est crucial de prendre l’initiative d’un échange direct : demander un entretien pour clarifier les attentes du poste, comprendre les motifs de certains changements, et exprimer ses propres besoins.
Si la situation persiste malgré ces démarches, le salarié peut envisager de solliciter un médiateur interne, comme un représentant des ressources humaines ou un membre du comité social et économique (CSE). En parallèle, il est important de se renseigner sur ses droits légaux en matière de harcèlement moral, en consultant un avocat spécialisé ou un conseiller du travail. Enfin, un salarié ne doit pas hésiter à explorer des opportunités professionnelles externes si la situation devient insoutenable. Prendre cette décision en connaissance de cause, avec un réseau professionnel actif, permet de protéger son bien-être tout en minimisant les impacts sur sa carrière.

Team Eurécia
Contributeurs timides, les billets signés de la rédaction sont tous écrits avec passion !