Le point RH légal : ce qu’il s’est passé en septembre

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Le point RH légal : ce qu’il s’est passé en septembre

Posté le - mis à jour le

Côté actualités légales, la rentrée de septembre 2024 aura été plutôt calme. Formation du nouveau gouvernement Barnier et désignation de la nouvelle ministre du travail et de l’emploi faites, nous devrions retrouver pour les prochains mois une reprise des dossiers sociaux restés en suspens. 

En attendant, petit tour d’horizon de quelques décisions de justice et actualités intéressantes du mois. 

Jurisprudence : nouveaux cas de préjudice automatique pour le salarié 

La cour de cassation continue de durcir sa position en cas de manquement de l’employeur à certaines règles de durées du travail.

 

Souvenez-vous, des décisions récentes avaient reconnu un droit pour le salarié à obtenir des dommages et intérêts sans avoir à démontrer un préjudice lorsque l’employeur ne respectait pas les durées maximales de travail quotidiennes ou hebdomadaires ou en cas de non-respect du temps de repos minimum obligatoire entre deux journées de travail (pour en savoir plus, c’est par ici). 

 

Dans la même lignée, deux arrêts du 4 septembre 2024 viennent préciser que d’autres manquements créent nécessairement un préjudice au salarié : 

  • Ne pas respecter le temps de pause de 20 minutes toutes les 6 heures prévu par l’article L. 3121-16 du code du travail (Cass.Soc n°23-15944). 

🔎 Dans les faits, la salariée travaillait tous les lundis en continu 10h30 sans pause. 

La Cour d’appel avait débouté la salariée au motif qu’elle ne s’était jamais plainte pendant l’exécution de son contrat et que les heures supplémentaires avaient bien été payées. La salariée ne rapportait donc la preuve d’aucun préjudice. La Cour de cassation censure ce raisonnement en s’appuyant sur le droit européen et sur l’obligation pour l’employeur d’assurer la santé et la sécurité de ses salariés.

 

  • Faire travailler le salarié pendant un arrêt maladie. Dans cette même affaire, la salariée avait également dû venir 3 fois pendant son arrêt pour effectuer ponctuellement et sur une période limitée une tâche professionnelle. 

 

Pour rappel, si la durée du congé maternité peut être adaptée, une période d’interdiction de travail d’au minimum 8 semaines doit être respectée dont 6 semaines qui suivent l’accouchement (Article L1225-29 code du travail). 

 

Par contre, la cour de cassation refuse de reconnaitre un préjudice automatique en cas d’absence de visite de reprise après le congé maternité. Elle réaffirme dans cette situation que le salarié doit démontrer un préjudice pour obtenir réparation. 

 

Jurisprudence : délai de prévenance et refus du congé parental 

👉 Une entreprise peut-elle refuser une demande de congé parental d’éducation lorsque le salarié ne respecte pas le délai de prévenance prévu par la loi ? 

 

En l’espèce, une salariée avait adressé une demande de congé parental 5 jours avant le début du congé souhaité alors que l’article L. 1225-50 prévoit un délai de prévenance : 

  • d’un mois lorsque le congé parental fait immédiatement suite au congé de maternité/d’adoption 

  • ou de deux mois dans le cas contraire. 

En s’appuyant sur cette disposition, l’entreprise avait refusé la demande initiale et invité la salariée à réitérer sa demande en lui communiquant une trame de courrier. 

 

La salariée contestait ce refus et invoquait une exécution déloyale du contrat de travail et une violation du droit au respect de sa vie privée. 

 

Dans un arrêt du 18 septembre 2024 (cass.soc n°23-18021), la Cour de cassation rappelle que le congé parental est un droit pour le salarié qui remplit les conditions légales pour en bénéficier. L’article L.1225-50 ne prévoyant pas d’irrecevabilité de la demande en cas de non-respect du délai de prévenance, l’employeur ne peut pas invoquer cet argument pour refuser le congé parental. 

 

Le respect du délai de prévenance n’est donc qu’une condition de forme permettant la bonne information de l’employeur des dates du congé mais ne peut être considéré comme une condition de fond. 

 

Jurisprudence : inaptitude et loyauté des propositions de reclassement

Un salarié déclaré inapte contestait la loyauté des offres de reclassement faites par son employeur. Neuf propositions de poste lui avaient été faites toutes éloignées géographiquement de son domicile. 

 

La Cour d’appel avait donné raison au salarié en considérant que l’employeur n’apportait pas la preuve qu’il n’existait pas de postes disponibles compatibles dans la région du salarié. Elle retenait alors la mauvaise foi de l’employeur et déclarait que les recherches de reclassement n’avaient pas été loyales et sérieuses.

 

La Cour de Cassation rejette cet argument. Dans son arrêt du 4 septembre 2024 (cass.soc 22-24005), elle relève que les offres de reclassement faites par l’employeur étaient conformes aux exigences légales en correspondant aux qualifications et aux aptitudes restantes du salarié. 

La déloyauté de l’employeur ne pouvait se déduire de l’absence de propositions de reclassement dans la région du salarié et il appartenait au salarié d’apporter des preuves du caractère déloyal des offres. 

 

Jurisprudence : accident du télétravailleur pendant la pause déjeuner

Si le dernier alinéa de l’article L. 1222-9 du code du travail précise bien que l’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l'exercice de l'activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail, des interrogations demeurent dans certaines situations. 

👉 Question épineuse qui a fait réagir ce mois-ci : l’accident survenu pendant la pause déjeuner du salarié en télétravail est- il un accident de travail ?

 Dans les faits, une salariée en télétravail a chuté dans son escalier au moment de sa pause déjeuner. L’entreprise avait fait une déclaration d’accident de travail sans émettre de réserve, déclaration rejetée par la CPAM. 

Selon la CPAM, l’accident ne s’était pas produit pendant l’exercice de l’activité professionnelle, la salariée ayant déjà réalisée son pointage pour partir en pause méridienne. Elle n’était donc plus sous la subordination de son employeur.  

Dans un arrêt du 2 septembre 2024 (RG n°23/00964), la cour d’appel d’Amiens reconnait le caractère professionnel de l’accident en relevant que l’accident s’étant produit au cours de la plage d’horaire variable fixée par l’employeur pour le déjeuner et que la pause déjeuner constitue une interruption de courte durée du travail, légalement prévue, assimilable au temps de l’exercice de l’activité professionnelle.  

Ce raisonnement s’appuie également sur l’égalité de traitement devant être appliquée au télétravailleur par rapport au salarié travaillant sur site. Un accident survenant pendant la pause déjeuner sur le lieu de travail (comme au restaurant d’entreprise ou dans un local dédié au repas) est en effet considéré comme un accident de travail.

Santé mentale : 13ème baromètre sur l’état psychologique des salariés. 

Le 3 septembre dernier, le Cabinet Empreinte humaine a publié les résultats de son 13ème baromètre « État de santé psychologique des salariés français » réalisé du 23 mai au 4 juin en partenariat avec OpinionWay (échantillon de 2 000 salariés français représentatif). 

L’étude indique que 42 % des salariés français sont dans un état de détresse psychologique, ce qui représente une baisse de 6 points par rapport à octobre 2023. Une situation qui reste cependant préoccupante avec notamment 15 % des salariés qui sont en situation de détresse psychologique élevée, allant jusqu’à une hospitalisation et des arrêts de travail de longue durée. Les jeunes de 18 à 29 ans et les télétravailleurs se disent particulièrement touchés. 

Si des facteurs extérieurs sont toujours présents (guerres Ukraine, Palestine, éco-anxiété, problèmes sociaux…), huit salariés sur dix attribuent partiellement ou totalement à leur environnement de travail leur état de détresse psychologique.

Parmi les facteurs les plus mentionnés par les travailleurs, il est mentionné le manque de temps (55 %), l’incapacité à refuser des tâches supplémentaires (46 %) et l’utilisation d’outils inadaptés (49 %). 40 % des employés déclarer travailler en situation de stress, craignant des erreurs et les blâmes associés.

Sur la prévention, le rapport souligne les efforts avec des salariés mieux formés à reconnaitre les signes de détresse psychologique notamment dans les grandes entreprises mais moins de 40% disposent de personnel dédié à la santé mentale. 

 

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Cet article a été rédigé par Joanne Thomassin

Consultante et formatrice en droit social et ressources humaines

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