Le point RH légal : ce qu’il s’est passé en mai

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Le point RH légal : ce qu’il s’est passé en mai

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Le joli mois de mai a pris fin et avec lui ses agréables ponts. Mais si un certain nombre d’entre nous avons pu en profiter pour décrocher quelques jours, il s’est aussi passé des choses intéressantes coté actu légales. On vous récapitule tout ça ! 

Alternance : fin des aides à l’embauche pour les contrats de professionnalisation

Le décret du 27 avril 2024 met fin à l’aide de 6 000 € accordée aux employeurs recrutant des jeunes de moins de 30 ans en contrat de professionnalisation pour toute embauche à compter du 1er mai 2024.

Ces aides exceptionnelles à l’embauche d’alternants avaient été initialement mises en place en 2020 dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution » et avaient été prolongées à plusieurs reprises.  Depuis le 1er janvier 2023, elles s’élevaient à 6 000€ et devaient s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2024 (on en parlait dans le point RH légal de janvier).

Mais dans un contexte de hausse du déficit public, le gouvernement a décidé de prendre des mesures d’économies. 

Selon les données de la Dares, on comptait, fin février 2024, 91 300 personnes en contrat de professionnalisation, un chiffre en baisse de 9% comparé à février 2023. En 2023, 116.000 contrats de professionnalisation avaient été signés.

Cette suppression ne concerne cependant pas les contrats d’apprentissage pour lesquels l’aide à l’embauche est maintenue. 

 

Négociations interprofessionnelles : échec de la négociation sur l’emploi des seniors et signature de deux nouveaux accords nationaux.

Après plusieurs mois de négociations difficiles dans le cadre du « nouveau pacte de vie au travail » souhaité par le gouvernement suite à la réforme des retraites, les partenaires sociaux ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur un projet d’ANI (accord national interprofessionnel) portant sur l’emploi des seniors.

Néanmoins, deux thèmes ont abouti à la signature d’un accord créant ainsi de potentiels nouveaux droits pour les salariés : 

Le 1er porte sur la création d’un compte épargne temps universel (Cetu) et a été signé par la CFDT et la CFTC côté syndical et par la seule U2P (union des entreprises de proximité) côté patronal. 

Aujourd’hui, le Compte épargne temps (CET) est un dispositif facultatif, mis en place par accord collectif de branche ou d’entreprise, qui permet au salarié s’il le souhaite d’épargner des jours de repos et/ou des primes pour les utiliser ultérieurement. En cas de départ de l’entreprise, le salarié perçoit alors les jours de CET non utilisés.

La création du Cetu permettrait à tout salarié âgé d’au moins 16 ans d’avoir la possibilité d’épargner du temps sur un compte spécifique, géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) qui le suivrait tout au long de sa carrière, même s’il change d’entreprise. Le Cetu ne serait alors fermé qu’au moment du départ en retraite du salarié. 

Il pourrait y placer des jours de congés (5ème semaine des congés payés), des RTT, des heures supplémentaires ou des primes en informant son employeur de son choix pour que ce dernier verse à la CDC le montant que le salarié aurait dû percevoir. 

En fonction des droits épargnés et de son ancienneté, le travailleur pourrait alors mobiliser son Cetu pour bénéficier d’un congé d’une durée comprise entre 1 mois et 12 mois ou réduire son temps de travail en respectant un délai de prévenance selon la durée du congé souhaité. 

Le 2nd accord porte sur la reconversion professionnelle et a été signé par la CFDT, la CFE-CGC, FO, CFTC côté syndical et par l’U2P côté patronal. 

Cet accord crée un nouveau dispositif de période de reconversion visant à remplacer les dispositifs actuels de Pro-A (promotion par l’alternance) et Transco (transitions collectives). 

La période de reconversion permettrait à un salarié de suivre une formation qualifiante ou diplômante sur 12 mois, en alternant période de formation au sein de son entreprise et période de formation dans un organisme de formation. 

Le contrat de travail serait maintenu, sans baisse de rémunération et un aménagement du temps de travail serait mis en place pour permettre au salarié de suivre sa formation. 

Ce dispositif pourrait s’adresser à des salariés nouvellement embauchés pour accompagner leur formation ou à des salariés devant s’adapter à des changements organisationnels. 

Les coûts pédagogiques seraient financés par l’Opco. 

Cet accord prévoit également une mutualisation de la prise en charge du coût des indemnités de licenciement pour inaptitude des salariés âgés de 55 ans ou plus, avec une durée d’expérimentation de cinq ans.

Ces deux accords ne sont cependant pas d’application directe. Pour être effectifs, ils devront être repris par le Gouvernement possiblement dans la future loi Travail attendue à l’automne 2024. 

Nouveau dossier à suivre donc… 

 

Assurance chômage : refus de l’agrément de la nouvelle convention d’assurance chômage et annonce de nouvelles règles pour la fin d’année 2024.

Le 1er ministre Gabriel Attal a annoncé le 26 mai dernier les principales évolutions attendues dans le cadre de la future réforme de l’assurance chômage. 

En principe, les règles d’indemnisation de l’assurance chômage sont fixées par les partenaires sociaux dans le cadre d’une convention d’assurance chômage renégociée régulièrement. Ces conventions sont ensuite agréées par l’État pour pouvoir entrer en vigueur.  

Le 27 novembre 2023, une nouvelle convention d’assurance chômage avait été signée. Le gouvernement avait cependant reporté sa décision d’agrément dans l’attente de la négociation interprofessionnelle sur l’emploi des seniors qui devait comprendre des dispositions sur les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi senior. 

Après l’échec de cette négociation, le gouvernement a refusé d’agréer la convention d’assurance chômage par arrêté du 10 mai 2024 et a donc repris la main pour définir les contours des futures règles. 

Avec un objectif affiché de retrouver le plein-emploi à l’horizon 2027, les règles d’indemnisation seront à nouveau durcies : 

  • Relèvement des conditions d’ouverture de droit : 8 mois de travail seront requis sur une période de 20 mois pour pouvoir prétendre à l’allocation de retour à l’emploi, contre 6 mois sur une période de 24 mois actuellement. 

  • Baisse de durée d’indemnisation selon la situation du marché du travail. 

Cette modulation de la durée d’indemnisation avait déjà été introduite lors de la dernière réforme en février 2023. 

Elle sera demain renforcée avec une durée d’indemnisation : 

  • limitée à 15 mois si le taux de chômage national est en dessous de 9% ;

  • limitée à 12 mois avec un taux de chômage inférieur à 6,5%.

👉 A noter, qu’au dernier trimestre 2023, le taux de chômage était de 7,5%.

Pour les demandeurs d’emploi seniors, les droits à une durée d’indemnisation plus longue seront ouverts à partir de 57 ans contre 55 ans aujourd’hui avec une durée maximale de 22,5 mois contre 27 mois aujourd’hui. 

  • Création d’un bonus emploi senior qui permettra au demandeur d’emploi de 57 ans et plus, en cas de reprise d’un emploi moins rémunéré que le précédent, de cumuler le salaire avec son allocation de retour à l’emploi pendant un an pour retrouver le niveau de salaire initial du demandeur d’emploi. 
  • Mensualisation des indemnités chômage : le montant de l’allocation de retour à l’emploi ne variera plus en fonction du nombre de jours dans le mois mais sera basé sur un nombre fixe de 30 jours par mois. 

Ces règles devraient s’appliquer aux demandeurs d’emploi dont le contrat de travail serait rompu à compter du 1er décembre 2024. 

 

Jurisprudence : faute grave et mise à pied conservatoire

Dans un arrêt du 2 mai 2024 (Cass.soc n°22-13869), la Cour de cassation précise que la procédure de licenciement pour faute grave n’impose pas une mise à pied conservatoire. 

Dans cette affaire, une salariée contestait son licenciement pour faute grave car l’employeur l’avait laissée à son poste de travail un mois le temps de la procédure disciplinaire. En invoquant le fait que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, elle s’appuyait sur l’absence de mise à pied conservatoire pour tenter de démontrer l’absence de faute grave. 

La Cour de cassation écarte cet argument en retenant que le maintien du salarié à son poste pendant le temps de la procédure disciplinaire n’est pas exclusif du droit pour l’employeur d’invoquer l’existence d’une faute grave. 

👉 Pour rappel, la mise à pied conservatoire est une mesure de prévention facultative qui permet d’écarter le salarié pendant le temps de la procédure disciplinaire pour éviter par exemple des risques de violence ou de destruction de matériel. Aucun texte n’impose donc de prononcer une mise à pied conservatoire dans le cadre d’une procédure de licenciement pour faute grave. 

Attention cependant, la Cour de cassation souligne l’importance en cas de faute grave d’engager la procédure disciplinaire dans un délai restreint après la connaissance des faits en convoquant le salarié rapidement à un entretien préalable. En l’espèce, la salariée avait reçu sa convocation à entretien préalable 7 jours après les faits reprochés. 

 

Rappel : partage de la valeur en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice – Engagement d’une négociation obligatoire avant le 30 juin 2024. 

Attention, comme nous vous l’avions présenté dans la newsletter de décembre 2023, les entreprises d'au moins 50 salariés disposant d’un accord de participation et/ou d’intéressement doivent ouvrir une négociation d’accord collectif d’ici le 30 juin 2024 pour définir la notion d’augmentation exceptionnelle du bénéfice au sein de l’entreprise et en définir les modalités de partage avec les salariés (exemple :  versement de supplément de participation ou d’intéressement). 

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Cet article a été rédigé par Joanne Thomassin

Consultante et formatrice en droit social et ressources humaines

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