Des congés à volonté, des jours off en cas de rupture amoureuse et aucun horaire imposé. Nous ne sommes pas dans un roman de work fiction, mais dans la réalité de certaines entreprises néo-zélandaises. Le plus fou, ce n’est pas tant l’idée que ses résultats : ces entreprises croulent sous les candidatures et leur productivité s’envole.
Le pari fou du zéro contrôle
En 2017, lors d’un recrutement, l’entreprise de jeux vidéo RocketWerkz a reçu plus de 600 CV. Un exploit pour une société de 40 salariés située au bout du monde, à Dunedin, Nouvelle-Zélande. Pourquoi cet engouement ? L’entreprise détonne dans le paysage : des congés illimités, des horaires libres et un management basé sur la confiance plutôt que sur le contrôle.
Six ans plus tard, l’histoire se répète. Hobby Lords, nouvelle venue dans l’univers des jeux de société, adopte la même philosophie. Résultat ? Plus de 150 candidatures spontanées dans un marché du travail sous tension. Liam O’Neill a vu les ravages du burnout dans sa carrière dans l’automobile. Pour sa nouvelle entreprise, il a choisi un modèle radicalement différent. Chez Hobby Lords, congés illimités et autonomie des équipes sont inscrits dans l'ADN même de l'entreprise.
Le plus surprenant ? Aucun abus constaté. Chez RocketWerkz, le fondateur Dean Hall, refuse de gérer toute une équipe en fonction des rares personnes qui tenteraient de frauder.
Le contrat de confiance version kiwi
Le concept des congés illimités n’est pas nouveau. C’est Netflix qui a ouvert la voie dès 2004, suivi par d’autres entreprises américaines, comme LinkedIn, Dropbox ou encore Microsoft. Mais c'est en Nouvelle-Zélande que cette révolution managériale prend une saveur particulière. Dans ce pays lointain, qui cherche à attirer les talents internationaux, la confiance et la flexibilité deviennent des arguments de poids.
En effet, les industries créatives demandent une bonne dose d’innovation. Difficile d’attendre que les employés accouchent d’idées originales dans un cadre trop strict. De nombreux managers seraient sans doute effrayés par l’idée d’une telle autonomie. Paradoxalement, dans ces entreprises néo-zélandaises, l’engagement monte en flèche. Plus les employés sont libres de leurs congés, plus ils s’investissent. Paradoxalement, loin des abus, la liberté responsabilise.
Finalement, cette approche a probablement plus d’avantages que d’inconvénients : productivité en hausse, attractivité record et, plus surprenant encore, les employés ne prennent en moyenne que deux à cinq jours de congés supplémentaires par rapport à la normale. Ces entreprises, ont-elles craqué le code pour trouver l’équilibre entre liberté et responsabilité ?
En France, l’utopie attend son heure
Alan dans l’assurance, Welcome to the Jungle dans les médias, mais aussi Luko, OpenClassrooms ou encore Popchef... Une poignée d’entreprises françaises a fait le grand saut vers les congés illimités. Cependant, cette pratique semble se limiter aujourd’hui aux startups et aux entreprises tech qui cherchent à se démarquer dans la guerre des talents.
Le concept a du mal à s’implanter en France, en commençant par des raisons réglementaires. Les congés illimités viennent nécessairement s’ajouter aux cinq semaines légales, là où aux États-Unis, cette politique vise d’abord à inciter les salariés à prendre des vacances ! D'une certaine manière, la crainte de devoir accorder plus de congés, bien au-delà du cadre légal généreux par rapport à d’autres pays, rend les entreprises frileuses.
Le libre choix : un saut dans le vide ?
Les freins sont autant culturels que pratiques. Du côté des collaborateurs, tout n’est pas rose non plus : sous ses airs de liberté totale, les congés illimités peuvent aussi générer du stress. Peur d’être jugé par ses collègues, crainte de perturber l’équipe, ambiguïté dans la gestion... Le “libre choix” se heurte inévitablement à la question de la culture d’entreprise.
Car au fond, c’est bien une question culturelle. Dans un pays où le présentéisme reste une valeur sûre, difficile d'imaginer lâcher totalement les rênes. Sommes-nous vraiment prêts à embrasser une liberté qui exige autant de confiance que de responsabilité ?