[Paroles d'experts] “L’intelligence émotionnelle, un des facteurs clés de l’épanouissement au travail ”

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Avez-vous déjà entendu parler de l’intelligence émotionnelle ? Bien souvent on parle d’intelligence qui s’évalue par le quotient intellectuel via des questions de logique par exemple. Mais saviez-vous que les émotions font parties d’une autre intelligence ? Alors, cette dimension émotionnelle influe-t-elle sur notre épanouissement au travail ?

Eh bien, c’est ce que j’ai voulu approfondir avec Catherine Bordaneil, coach professionnelle certifiée à l’outil EQ-i 2.0.

Parole à l’experte !

Bonjour Catherine, alors c’est quoi l’intelligence émotionnelle ?

La notion d’intelligence émotionnelle est récente (le terme est employé pour la première fois par 2 psychologues américains John Mayer & Peter Salovey en 1990). L’intelligence émotionnelles se définit comme un ensemble d’aptitudes qu’on a tous, émotionnelles et sociales, qui influencent la façon dont on perçoit et on exprime nos émotions, la façon dont on développe et maintient nos relations à l’autre, la façon dont on agit dans la difficulté et dans les situations qu’on ne connait pas.

C’est la manière dont on va utiliser l’émotion dans notre quotidien, dans n’importe quelle situation. On a tous des émotions et être intelligent émotionnellement c’est savoir recevoir une émotion comme une information, et ça, c’est ce qui est justement le plus complexe. Parce qu’on a tous des stades de maturité différents : avoir conscience de ce qu’on ressent, l’exprimer correctement, comprendre l’émotion, savoir la réguler, la comprendre et la réguler chez les autres, et enfin savoir l’utiliser. Il est également essentiel d’intégrer l’influence de notre propre vécu personnel pour comprendre nos mécanismes émotionnels. La première démarche est d’accueillir l’émotion comme une information sans la nier, ni l’amplifier. L’identifier, l’accepter, l’analyser à sa juste place pour mieux la réguler, c’est ce que les personnes « émotionnellement » développées arrivent à faire.

Le biologiste et psychologue suisse Jean Piaget disait « L’intelligence ce n'est pas ce que l'on sait, mais ce que l'on fait quand on ne sait pas ». Et c’est exactement ça !

Comment évalue-t-on l’intelligence émotionnelle ?

Evaluer l’intelligence émotionnelle peut s’avérer complexe surtout s’il on n’est pas accompagné. Comment faire le tri entre ce qu’on ressent et la situation réelle ?

Quand on est dans un environnement très sécurisé, naturellement on réagit sainement avec soi-même et les autres. Sauf que tous les jours notre environnement nous impose des situations que l’on peut identifier comme insécurisées (la situation est la même pour tous mais elle est ressentie différemment) avec une intensité propre à chacun et c’est dans ces moment dits « d’insécurité » qu’il est utile de s’évaluer ou plutôt de s’auto évaluer : où sont mes forces, mes ressources, mes axes d’amélioration, mes zones d’ombre … ?

Bref : se connaître, se comprendre et se découvrir soi-même avant d’entreprendre de se réguler.

Pour découvrir son intelligence émotionnelle, il y a notamment l’outil EQ-i, créé par le psychologue et scientifique Dr Reuven Bar-On, après 17 ans d’études dans 11 pays. Cet outil est un diagnostic d’auto-évaluation d’intelligence émotionnelle qui évalue quinze compétences sur cinq échelles :

  • La relation intrapersonnelle : la relation qu’on a avec soi-même,
  • L'expression émotionnelle : comment on exprime nos émotions,
  • La relation humaine : comment on interagit avec les autres,
  • La prise de décision,
  • et la gestion du stress.

Concrètement, la personne qui utilise l’outil complète un questionnaire de 133 questions en ligne. Un rapport est alors établi, et sur la base de ce rapport, le coaching se met en place.

Voici à quoi ressemble le rapport de résultats :

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A partir de ce rapport, la personne pourra concrètement identifier ses forces naturelles, ses ressources comme ses axes d’amélioration sur  15 compétences : l’empathie, l’optimiste, le sens de la réalité, l’expression émotionnelle, la tolérance au stress…. L’outil est une base pour élaborer un plan d’actions pour développer les compétences que l’on souhaite.

Pour illustrer, une personne peut avoir une très belle compétence en relation humaines mais être dépendante de son émotion. Ce « déséquilibre » peut l’amener à s’effacer en groupe voire changer d’avis régulièrement par peur de « déplaire ».

J’ai également en tête une personne qui s’est rendue compte qu’elle avait un sens de la réalité assez fort mais peu de flexibilité. C’est en se remémorant ses expériences vécues d’une rigidité trop importante que cette personne a pris conscience de son besoin de développer sa flexibilité d’elle-même en s’appuyant sur ses propres ressources.

Les mécanismes émotionnels ne sont pas si évidents à identifier et encore moins à accepter. C’est pour cette raison que l’outil n’est rien sans accompagnement ! Tout le sens et la puissance réside dans l’accompagnement, pour permettre à la personne d’identifier ce qu’elle est et ce qu’elle souhaite atteindre ou changer. Chaque situation est différente par nature parce que chaque personne est différente. C’est ce qui est passionnant.

C’est un outil également bienveillant : car il s’appuie avant tout sur les forces de la personne pour faire bouger les compétences moins élevées. L’outil est également pragmatique puisqu’il projette la personne dans son quotidien.

Et bonne nouvelle il est possible de développer ses compétences en intelligence émotionnelle !

 

Un outil suffit à améliorer son intelligence émotionnelle ?

Non, l’outil n’est pas une baguette magique ! Il doit être accompagné. C’est dans le coaching qu’il prend toute sa dimension. Si la personne s’investit régulièrement et est motivée, il y aura des résultats c’est certain. Le parcours d’apprentissage peut également être un vrai plaisir : le plaisir d’apprendre sur soi moi-même par soi-même en bienveillance.

 

En quoi l’intelligence émotionnelle influence l’épanouissement au travail ?

Déjà, je vous mets au défi de définir l’épanouissement ! Chacun pourrait avoir sa propre définition Il semblerait que pour la majorité des gens, l’épanouissement soit synonyme de sérénité, sécurité, enthousiasme, réalisation de soi…. La Harvard Business Review définit deux conditions pour permettre l’épanouissement :  ressentir de la vitalité et être dans un processus d’apprentissage continu.

Pour les entreprises, il y a un vrai enjeu et un réel intérêt à ce que leurs collaborateurs soient épanouis. Moins d’arrêt maladie, moins de burnout, plus d’engagement, plus de motivation… Je ne vous l’apprends pas. J’ajouterais que les personnes « épanouies » peuvent être des leaders naturels et créer  une mouvance positive au sein du collectif.

D’ailleurs, avec l’outil EQi la personne auto évalue son bien-être via ses compétences en amour propre, relations humaines, l’optimisme et réalisation de soi.

On observe que ceux qui ont une intelligence émotionnelle développée ont cette confiance, ce recul par rapport à ce qu’ils ressentent, ils vivent les situations difficiles en identifiant la dimension factuelle sans pour autant nier le facteur émotionnel. Ils sont attentifs à leur ressenti sans être en être prisonnier. Quand on rencontre quelqu'un qui a un équilibre émotionnel, il sait qui il est. Et l’épanouissement au travail ça commence par ça finalement.

A contrario, une personne qui ne se connaît pas ou mal, qui ne connait pas ses mécanismes émotionnels peut tourner en rond, ruminer et par conséquent ne pas avancer, et devenir prisonnier de ses ressentis.

L’entreprise a tout à y gagner : favoriser l’état d’esprit positif et l’état d’actions positif de son collectif.

Chacun a sa propre définition du bonheur mais pour moi c’est d’abord avoir un ancrage interne solide. Et le bien-être au travail ne provient pas seulement de l’extérieur, de son entreprise, de ses collègues mais aussi de sa propre sécurité interne et ce bien-être ne peut exister sans se connaitre soi.

Exemple de bénéfice : un manager qui aura un équilibre entre sa compétence empathie et assertivité, saura communiquer clairement sa vision, mieux la partager en prenant en compte l’état émotionnel de son équipe. Il pourra alors mieux embarquer son équipe au succès en rattachant correctement la dimension émotionnelle aux situations.

J’observe d’ailleurs que pendant des années, dans la majorité des entreprises, on demandait aux salariés de laisser leurs émotions devant la porte. La période que nous traversons implique une meilleure conscience de l’entreprise, une volonté d’accueillir les émotions et de ne plus les nier, de ne plus en avoir peur…. Car une émotion refoulée se traduit bien souvent par des dégradations physiques, même des maladies, des arrêts de travail. Essayez d’ignorer une émotion et elle fera son chemin... Il y a un réel danger de ne pas ouvrir ce sujet des émotions et de l’intelligence émotionnelle dans les organisations surtout en période de crise, ou tout peut être amplifié !

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Auriez-vous des conseils à donner aux entreprises qui souhaiteraient développer cet aspect ?

Il est important de mettre en place des actions réalistes et constructives pour être performant. Pour les entreprises, la première attention à avoir serait de :

  • Former les managers aux « émotions ». Comment les accueillir, les comprendre, les écouter. Il ne s’agit pas de favoriser l’épanchement au contraire il s’agit d’avoir une approche structurée. Accompagner les managers à connaitre leurs propres compétences en intelligence émotionnelle, c’est ce qui leur permettra de fédérer et aider leur équipe. Les accompagner également à développement leur posture d’ouverture : poser des questions ouvertes, écouter, reformuler tout en étant conscient des choses, montrer de l’empathie et échanger ouvertement sur les besoins.
  • Créer des espaces de partages et d’expression émotionnelle sécurisés. Colère, frustration, peur… Si ces émotions ne sont pas exprimées de manière saine dans un endroit « safe », elles s’exprimeront autrement de manière plus confuse. Il y a un enjeu de créer ça et d’en faire quelque chose de constructif.
  • Un autre axe important : cultiver l’optimisme. Cela correspond au courant de la psychologie positive. C’est par exemple communiquer sur les réussites internes, les petites victoires… Passer par un prisme positif. En conservant néanmoins le sens de la réalité, tenir compte des difficultés de chacun, surtout ne pas les nier.  Voir les choses positivement influence les personnes positivement.

C’est en fait plus une question de forme que de fond, il faut trouver le bon ton et surtout de pas hésiter à tester des choses.

 

Avez-vous des tips pour les salariés en télétravail ?

Pour les salariés qui rencontreraient des émotions un peu trop fortes, en télétravail ou non, il y a quelque chose que j’utilise pour moi et qui peut rapidement réguler une émotion trop forte : écrire 15 min tous les jours pendant au moins trois jours en exprimant ce qui ne va pas. Cela permet d’enclencher un processus d’expression émotionnelle indispensable à la régulation. Surtout ne pas se limiter dans l’écriture des propos y compris si on s’aperçoit que les propos sont très forts. Le problème une fois exprimé peut trouver une solution rapidement. Poser le sujet et l’écrire c’est le digérer. Il y a alors un lâcher-prise et une acceptation. Sans ça, c’est impossible et le risque de rester dans un schéma négatif est important.

Le climat de travail est plus serein quand chacun saisit sa propre responsabilité par rapport à ça. Et c’est aussi le rôle de l’entreprise de ne pas considérer les salariés comme des enfants.

 

Un dernier mot pour conclure ?

Les émotions c’est la vie ! Encore une fois la pire des solutions ce serait de nier ou de continuer à nier les états ou mécanismes émotionnels. Il s’agit d’instaurer une certaine culture d’Intelligence émotionnelle comme quelque chose de sain à instaurer dans l’organisation. Oui, je conseille grandement aux entreprises de saisir l’accompagnement de leurs salariés. Structurer l’apprentissage, accepter que cela prend du temps, accepter également que ce ne soit pas évaluable par des KPI chiffrés sur le court ou moyen terme. En tout cas, le lien est clairement établi entre l’intelligence émotionnelle et l’épanouissement.

 

La FAQ Eurécia

Quels sont les composants clés de l'intelligence émotionnelle ?

  • L'auto-analyse : c'est la capacité de comprendre et d'identifier ses propres émotions, forces et valeurs, ce qui a un impact direct sur la confiance en soi et l'estime de soi.
  • La maîtrise de soi : il s'agit de la capacité à gérer et contrôler ses émotions, en évitant de se laisser submerger par des sentiments négatifs comme la colère ou le stress.
  • La motivation personnelle : cela fait référence à la capacité de trouver un sens et une direction dans la vie, de surmonter les obstacles avec ténacité et de développer la résilience face aux échecs.
  • L'empathie : c'est la capacité de comprendre et de se connecter aux émotions des autres, une compétence essentielle dans les interactions sociales, en commerce ou en management.
  • La sociabilité : cette compétence permet de bâtir et de maintenir des relations saines, en exprimant ses droits et besoins tout en respectant ceux des autres.
 

L'intelligence émotionnelle peut-elle être améliorée avec le temps ?

Bien sûr. Cela commence par une auto-évaluation pour identifier les forces et les domaines à améliorer. Des méthodes peuvent aider à développer cette intelligence.

En améliorant l'intelligence émotionnelle, on peut non seulement mieux gérer les relations au travail, mais aussi améliorer la qualité de la prise de décision, gérer le stress de manière plus efficace et augmenter la productivité. C'est un atout majeur pour le bien-être personnel et professionnel.
 

Peut-on mesurer l'intelligence émotionnelle de manière objective ?

Chaque individu est différent. Dans une certaine mesure, l'intelligence émotionnelle peut être évaluée grâce à des outils d'évaluation conçus par des experts en psychologie :

  • Bar-On Emotional Quotient Inventory (EQ-i) : développé par Reuven Bar-On, cet outil évalue l'intelligence émotionnelle à travers cinq composantes : l'intrapsychique, l'interpersonnel, le bien-être général, l'adaptabilité et la gestion du stress.
  • Emotional Intelligence Appraisal (EIA) : créé par Travis Bradberry et Jean Greaves, ce test se focalise sur quatre compétences clés : la perception émotionnelle, la gestion émotionnelle, la prise de décision émotionnelle et la gestion des relations.
  • Trait Emotional Intelligence Questionnaire (TEIQue) : ce questionnaire, élaboré par K.V. Petrides, évalue l'intelligence émotionnelle à partir de traits émotionnels, notamment la compréhension et l'expression émotionnelle, l'empathie et la maîtrise émotionnelle.
  • Swinburne University Emotional Intelligence Test (SUEIT) : développé par Con Stough et son équipe, il mesure la perception et la compréhension émotionnelles, la gestion émotionnelle et les compétences sociales.
 

Quel est le rôle de l'intelligence émotionnelle dans la gestion des conflits ?

L'intelligence émotionnelle aide à décrypter les émotions et le langage non-verbal, facilitant ainsi la compréhension des besoins et des attentes des autres. Elle permet une expression plus authentique et diplomate, essentielle dans la résolution des conflits​​.

Les individus avec une intelligence émotionnelle élevée comprennent mieux leurs émotions et motivations, ce qui guide leurs décisions vers des choix alignés avec leurs besoins et ceux de l'entreprise. Ils sont capables de prendre du recul face aux émotions négatives pour des décisions plus réfléchies et rationnelles​​.

En aidant les autres à gérer leurs émotions et en étant perçu comme une personne de confiance, un individu doté d'une forte intelligence émotionnelle crée un environnement de travail positif.
 

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Nous le savons, un salarié heureux est un salarié motivé et performant !

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Cet article a été rédigé par Catherine Bordaneil

Coach professionnelle

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