Fausse couche, vrai sujet : faut-il en parler au travail ?

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Je fais partie de ces personnes qui pensent que sur les réseaux sociaux, tout n’est pas à jeter. Bien au contraire. Ils ont notamment permis la libération de la parole sur de nombreux sujets. Parmi eux : la fausse couche.  

De plus en plus de femmes demandent d’ailleurs à ce que l’on cesse d’utiliser ce terme et qu’on lui préfère l’expression de “grossesse arrêtée”. Car rien n’est faux, dans une grossesse qui s’arrête. Tout est réel, tangible, brutal.

400 000 personnes touchées par an

Longtemps tabou, le sujet est de plus abordé. En témoigne notamment le succès du compte Instagram @mespresquesriens et ses 31 000 abonnés, derrière lequel se cache Mathilde Lemiesle, qui a fait de la grossesse arrêtée son cheval de bataille. Et il n’est pas rare de croiser en scrollant sur les réseaux une créatrice de contenus évoquant avec tristesse et transparence une grossesse arrêtée, permettant ainsi à des milliers de femmes de se sentir moins seules.  

Des milliers, voire… Des centaines de milliers ? Car en France, 200 000 femmes subissent cela chaque année. Une grossesse sur quatre s’arrête au cours du premier trimestre. 200 000 femmes et donc, par ricochet, environ 200 000 co-parents concernés.  

Une grossesse qui s’arrête pour 400 000 personnes, c’est tout sauf «presque rien»

Pourtant, dans le cadre professionnel, souvent, les femmes préfèrent le taire. Les raisons évoquées sont multiples. Et compréhensibles. Parmi elles : la honte, la pudeur, la peur de dévoiler au travail le désir d’avoir un bébé, l’appréhension face aux éventuelles réflexions maladroites telles que « t’en feras d’autres », « tu n’aurais pas dû faire autant de sport » ou encore « au moins tu sais que ça fonctionne ».  

Un mouvement de société en cours

Si les dirigeantes qui traversent une telle épreuve peuvent arrêter de travailler quelques jours sans devoir vraiment le justifier, ce n’est pas le cas des salariées. Jusqu’à récemment, les femmes salariées confrontées à une interruption médicale de grossesse pouvaient bénéficier d’un arrêt de travail classique (pas toujours proposé par les médecins, mais c’est un autre sujet) incluant les habituels trois jours de carence. Ce n’est que depuis le 1er juillet 2024 que ces jours de carence ont été supprimés, grâce notamment à une mobilisation massive sur les réseaux sociaux et à une pétition publiée dans le journal Le Monde ayant récolté plus de 38 000 signatures.

Mais subsiste encore cette question : faut-il en parler au travail ? La réponse est loin d’être évidente, et je sais que pour de nombreuses femmes encore, c’est un « non » catégorique. Pour nuancer ce « non », je pourrais parler de cette amie qui l’a fait. Je me souviens qu’elle a longtemps hésité. Mais entre le moment où elle a appris que le cœur du fœtus avait cessé de battre et le moment où a eu lieu l’intervention, deux semaines sont passées. Deux semaines de souffrance indicible, de larmes, de rendez-vous médicaux. Deux semaines interminables, pendant lesquelles elle avait pourtant des comptes à rendre au travail, des délais à respecter, une équipe à manager.

Lorsqu’elle a fini par parler de cette interruption de grossesse à son supérieur hiérarchique, elle s’est sentie soulagée. Car contre toute attente, cette annonce a été accueillie par cet homme avec beaucoup de bienveillance et d’empathie. Les mots qu’il a eus à l’égard de mon amie lui ont même fait penser qu’il avait certainement traversé un jour cette épreuve avec sa femme. Elle a donc pu avoir le temps de la tristesse, du deuil (car c'est de cela dont il s'agit) et l’attachement à l’entreprise pour laquelle elle travaille n’en a été que renforcé.  

Il existe donc un monde du travail dans lequel la souffrance des femmes traversant cet événement traumatique n’est pas minimisée.  

Cet article a été rédigé par Sophie Franco

Communicante et rédactrice

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